Sylvie Laliberté : une artiste en général

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Le rire est un travail délicat d’intelligence. 
Et comme « trois ou quatre gouttes de hauteur 
n’ont rien à voir avec la barbarie », selon les mots 
de Marcel Duchamp, l’humour de Sylvie Laliberté 
n’a rien à voir avec la raillerie. Il relève plutôt 
de l’instinct du jeu, d’un jeu espiègle et 
désarmant.

— Jean-Pierre Latour, ETC Montréal, n° 49, printemps 2000.

 

« Artiste en général », c’est ainsi que Sylvie Laliberté se définit, puisque, pour elle, l’artiste ne doit pas nécessairement s’identifier à ses médiums. Les étiquettes d’artiste pluri-, multi-, trans-, interdisciplinaire, ou encore d’artiste issue de l’esthétique relationnelle, très peu pour elle, car ces formules, bien que dans l’air du temps, ne résument en rien sa démarche artistique. Créatrice inclassable et polyvalente, Sylvie Laliberté préfère expérimenter avec différents médiums, souvent un — ou peut-être deux — à la fois, pour exprimer ce qu’elle a à nous transmettre. Trop souvent, dans le « milieu » des arts en général et des arts visuels en particulier, l’on se plaît à catégoriser les artistes, à les placer dans des cases rassurantes pour les exégètes. À titre d’exemple, son exposition personnelle Œuvre de politesse, présentée au Musée d’art contemporain de Montréal en 2001, a amené certains commentateurs à dire que son exposition « ne fonctionnait pas », parce qu’elle ne répondait pas aux préceptes de l’esthétique relationnelle selon lesquels l’artiste aurait dû entrer en relation directe avec le public. Laliberté, en fait, souhaitait simplement souligner le rôle du spectateur et sa place dans un projet d’exposition. L’esthétique relationnelle, apparue d’abord en France et formulée par le théoricien et commissaire Nicolas Bourriaud dans un ouvrage paru en 1998, est un courant artistique auquel Laliberté ne s’est jamais identifiée, car elle a toujours souhaité garder le « quatrième mur » entre elle et le public. Le maintenir en place lui permettait d’en « discourir un peu », justement, puisque selon Laliberté, « l’art est toujours représentation ou en représentation. »